Hier après-midi, 25 juin, je suis allé faire un petit tour du côté du quartier huppé de l'Elysée, dans le VIIIe arrondissement de Paris. Remontant la rue du Faubourg Saint-Honoré depuis la place Beauvau, vers 18 heures, je venai tout juste de passer devant le portail du palais présidentiel, situé sur le trottoir d'en-face, lorsque je vis sortir de la cour d'honneur, en fanfare, une voiture officielle avec un petit drapeau de l'ONU accroché à l'extrémité du capot : c'était la voiture du secrétaire général des Nations Unies, le sud-coréen Ban Ki-Moon, que l'on pouvait voir du reste, à l'arrière du véhicule, les vitres de ce dernier étant transparentes. A peine cette voiture était-elle partie que je vis arriver devant le portail, entourée de l'habituelle escorte de sécurité, une Cadillac 4x4 noire, massive, venue de l'avenue de Marigny et de la place Beauvau, qui s'avança et pénétra dans la cour d'honneur du palais. Revenant un peu sur mes pas, je ne pus qu'apercevoir en partie, depuis le trottoir d'en face, ce qui se passa ensuite. A travers les grilles du portail promptement refermées après le passage du véhicule, je pus voir la voiture traverser la cour et venir se garer parallèlement aux marches du perron du palais, bouchant ainsi une partie de la vue. Je vis un homme de grande taille, de dos, gravir, une fois sorti de la voiture, les marches du perron, accompagné par un représentant de la présidence venu l'accueillir. L'homme, se tournant légèrement et brièvement sur sa gauche, salua de la main une assistance invisible, vraisemblablement un groupe de journalistes parqués, comme à l'accoutumée, dans un coin de la cour d'honneur, au moment des visites officielles. Le geste de salutation fut bref, et l'homme s'engouffra bien vite dans le palais, sous bonne escorte...
Cet homme de grande taille, venu en Cadillac 4x4, était Arnold Schwarzenegger, l'ancien champion de culturisme et acteur de films d'action, américain d'origine autrichienne, élu gouverneur de Californie en 2003 et réélu à ce poste en 2006. Il était venu rendre visite au président Sarkozy récemment élu à la plus haute charge de l'Etat. Conan le républicain venu rencontrer "Gollum" : un grand moment pour les amateurs de fantasy... ;-) Pronostiquant un entretien entre les deux hommes d'environ une trentaine de minutes, je décidais, après avoir poursuivi mon chemin et acheté un journal rue Royale, de revenir sur mes pas, vers la place Beauvau, et d'attendre la fin de la visite officielle.
J'ai donc passé un moment à lire un exemplaire du journal Le Monde daté du mardi 26 juin, sur un banc public de l'avenue de Marigny, qui longe la partie occidentale de l'Elysée. J'ai lu divers articles, dont un évoquant les réactions peu enthousiastes du président du Conseil italien, Romano Prodi, du premier ministre du Luxembourg, Jean-Claude Juncker, et de Guy Verhofstadt, le premier ministre démissionnaire de Belgique, vis-à-vis des résultats du sommet européen de Bruxelles de la semaine dernière, qui a abouti in extremis à un accord sur un traité simplifié - ou "traité modificatif"- remplaçant la Constitution européenne rejetée par les Français et les Néerlandais en 2005. Précisons que le nouveau traité "réformateur", ou "traité modificatif" dans son appellation française, dont les grandes lignes ont été fixées samedi dernier, 23 juin, se contentera d'amender, plutôt que de les remplacer, les traités existants : celui sur l'Union européenne et celui de Rome, qui sera rebaptisé "Traité sur le fonctionnement de l'Union". Prodi, Verhofstadt et Juncker dénoncent un traité illisible et "le recul de l'esprit européen", et sur un certain nombre de points, il me parait assez difficile de leur donner tort, même s'il faut sans doute attendre le texte définitif pour se faire une idée plus précise de ce que l'on peut en penser et pour définir quelle sera l'attitude à adopter au moment de la ratification. Un autre article du Monde évoquait une perte de terrain de Ségolène Royal au sein du Parti Socialiste, à l'occasion du Conseil national du PS du 23 juin, où elle était absente. Ce Conseil national a voté samedi, à une écrasante majorité, le calendrier de "rénovation" du parti proposé par son premier secrétaire François Hollande, lequel n'a, sans surprise, pas voulu remettre en cause la position qu'il occupe à la tête du parti, et n'a pas voulu qu'un congrès du parti soit organisé avant les élections municipales de 2008. Hollande a eu beau saluer devant la presse "l'esprit de rénovation et de rassemblement qui a prévalu", le fait est qu'avec le maintien du status quo qui vient d'être décidé pour un an, on peut se demander quand le PS aura enfin droit à un véritable changement... Enfin, passons...
Après avoir lu quelques articles de mon journal, voyant l'heure supposée de la fin de l'entretien entre Sarkozy et Schwarzenegger approcher, je fis le tour de l'enceinte du palais, en passant par la rue de l'Elysée. De retour dans la rue du Faubourg Saint-Honoré, sur le trottoir où je me trouvait précédemment, je n'eu pas longtemps à attendre, avant de voir sortir la Cadillac du gouverneur de Californie, sans fanfare, du palais présidentiel, Cadillac qui passa devant moi en remontant la voie en direction de la rue Royale, avant de disparaître dans la circulation... Il y avait assez peu de monde dans la rue, mais des gens ont tout-de-même tenté de prendre des photographies, sans grand succès, dans la mesure où les vitres de la Cadillac étaient fumées, teintées de noir... En fait, tout c'est passé si discrètement, qu'il n'y avait pas, en définitive, grand-chose à voir, le public devant dès lors se contenter des informations que pouvait lui donner les journalistes, après coup.
Chacun aura donc pu découvrir, par la suite, les photographies, prises sur le perron de l'Elysée, montrant Sarkozy de Nagy-Bocsa et Schwarzenegger souriant et se serrant la main, au terme de leur rencontre, le président de la République française ayant tenu à raccompagner personnellement le gouverneur de Californie jusqu'aux marches du perron. Ils avaient l'air très contents de s'être rencontrés. Pour le reste, l'essentiel est dans les dépêches des agences de presse :
Pour son premier passage à Paris en tant que gouverneur de Californie, Arnold Schwarzenegger s'est entretenu avec Nicolas Sarkozy, dont il a dit apprécier l'énergie et l'ouverture d'esprit.
L'ancien champion de body building et ancien acteur d'origine autrichienne a été reçu pendant une demi-heure à l'Elysée par le nouveau chef de l'Etat français.
"Le président Sarkozy est une force nouvelle. Il donne du sang neuf à la politique de par le monde", a déclaré la vedette de "Terminator" à la presse après son entretien.
"Il croit à l'ouverture. Pour lui, il faut inclure les gens et non pas voir ceux qui ne sont pas d'accord avec lui comme des ennemis potentiels", a ajouté Arnold Schwarzenegger, qui était accompagné de l'une de ses filles.
"C'est quelque chose que j'ai moi-même fait : j'ai fait entrer dans mon cabinet des personnes qui ne pensa ient pas comme moi", a ajouté "The Governator", qui a été réélu en novembre dernier.
"Je veux faire tout mon possible pour l'aider et nous devrions travailler ensemble", a-t-il ajouté à propos du président français, qui l'a raccompagné sur le perron.
Selon le récit du gouverneur américain, arrivé dans la cour d'honneur à bord d'un imposant 4x4 noir, la discussion avec Nicolas Sarkozy a notamment porté sur la lutte contre le réchauffement climatique, dont il a lui-même fait une priorité.
La Californie a été le premier Etat américain à s'engager sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, conformément au protocole de Kyoto que Washington refuse de ratifier. Arnold Schwarzenegger promeut également l'énergie solaire et les carburants propres.
Nicolas Sarkozy et son hôte ont également parlé de train à grande vitesse, de partenariat public-privé et envisagé la mise sur pied, l'an prochain, d'une mission commerciale visant à promouvoir les produits français en Californie ainsi que les produits californiens dans l'Hexagone.
Arnold Schwarzenegger, qui effectue une tournée européenne, a dit son plaisir de revenir en France, où il a dit être déjà venu une centaine de fois en vacances, pour des compétitions de culturisme ou pour promouvoir des films, notamment au festival de Cannes.
Il s'est aussi souvenu que, jeune homme, il avait gagné à Paris en 1971 le concours de culturisme Monsieur Olympia, qu'il a d'ailleurs remporté à sept reprises.
(Dépêche de l'agence de presse Reuters, 25 juin 2007, 20:02)
Schwarzenegger salue "l'ouverture" et l'énergie de Sarkozy
Arnold Schwarzenegger a salué lundi à Paris "l'ouverture" politique pratiquée par Nicolas Sarkozy et la "nouvelle énergie" qu'il allait insuffler aux relations internationales.
Le gouverneur républicain de Californie, ancien champion de culturisme et star des films d'action, rendu célèbre dans le monde pour son rôle de "Terminator", s'est entretenu pendant environ une demi-heure avec le chef de l'Etat.
"Je suis déjà venu une centaine de fois en France mais c'est la première fois que je viens en tant que gouverneur de Californie", a expliqué M. Schwarzenegger, arrivé à l'Elysée à bord d'une imposante Cadillac 4X4 noire.
Il a été raccompagné sur le perron par M. Sarkozy dont il a longuement serré la main, devant une foule de journalistes, photographes et cameramen.
"Je pense qu'il apporte vraiment un sang neuf à la politique", a-t-il dit. "J'ai énormément d'admiration pour lui et je pense que tous les hommes politiques dans le monde l'admirent pour sa politique d'ouverture. Il va insuffler une énergie nouvelle dans les relations entre la France et les autres pays et avec notre Etat", a-t-il assuré.
"Je veux faire mon possible pour l'aider", a affirmé le gouverneur de Californie.
Ils ont ainsi parlé de la manière dont "la France et la Californie peuvent travailler ensemble pour lutter contre le réchauffement climatique et en faveur de l'environnement", a-t-il dit.
Arnold Schwarzenegger s'est fait aux Etats-Unis le champion, avec l'ancien vice-président Al Gore, de la lutte pour l'environnement. En 2006, la Californie a ainsi été le premier Etat américain à s'engager à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, conformément au protocole de Kyoto rejeté par l'administration de George W. Bush.
Ils ont aussi évoqué la possibilité d'ouvrir, l'année prochaine, une mission commerciale de Californie en France et ont parlé du TGV.
Après son étape parisienne, Arnold Schwarzenegger devait rencontrer mardi matin à Londres Tony Blair pour ce qui devait être le dernier entretien bilatéral du Premier ministre britannique avant de quitter le 10 Downing Street.
(Dépêche de l'Agence France Presse [AFP], 25 juin 2007, 21:17)
Le fait de voir ces deux hommes politiques ensemble ne manque pas de piquant, quand on sait de quelle façon chacun d'eux est arrivé aux responsabilités qui sont aujourd'hui les leurs. Ils ont, du reste, un certain nombre de points communs : même importance des médias et de la communication dans leur action politique, même habileté pour se faire élire, mêmes soutiens républicains - au sens américain du terme - tout en ayant la même volonté affichée de pratiquer l'ouverture vis-à-vis des adversaires, etc.
En tant qu'acteur de cinéma, le meilleur rôle d'Arnold Schwarzenegger reste avant tout, pour moi, celui de Conan le Cimmérien, le célèbre personnage de fantasy créé par l'écrivain Robert E. Howard, et que l'actuel gouverneur de Californie a incarné notamment dans le magnifique film du génial John Milius Conan le Barbare (Conan the Barbarian, 1981), film dont la merveilleuse musique, composée par le non moins génial - et regretté - Basil Poledouris, reste aujourd'hui un modèle du genre. De fait, bien qu'il soit républicain et qu'il considère Ronald Reagan comme un modèle, le souvenir qu'il laisse en tant qu'acteur dans quelques films particulièrement réussis - comme Conan the Barbarian de J. Milius, et Total Recall (1990) de Paul Verhoeven -, aurait plutôt tendance à me le rendre sympathique. Mais pour autant, la distinction entre l'ancien acteur et l'homme politique me parait indispensable, car je n'oublie pas qu'en 2003, Schwarzenegger avait transformé le scrutin qui l'a porté au pouvoir en Californie en spectacle entièrement basé sur son statut de star du cinéma hollywoodien. Argent, célébrité et marketing avaient dominé la campagne électorale, au détriment des idées politiques, le programme de Schwarzenegger étant, du reste, essentiellement basé sur la dénonciation, assez démagogique, des excès de dépenses et de taxes attribués au gouvernement démocrate sortant... Des méthodes qui en rappellent d'autres, et qui rend d'autant plus piquante la rencontre d'hier entre le grand Conan et le petit "Gollum" à l'Elysée... ;-) Aujourd'hui, je constate que la politique de Schwarzenegger en matière environnementale, et notammet de lutte contre le réchauffement climatique, est plutôt positive, et même innovante dans un pays pollueur comme les Etats-Unis d'Amérique, mais je n'en reste pas moins prudent et attends de voir quel bilan définitif il pourra être fait de l'action politique du gouverneur de Californie lorsque son deuxième mandat prendra fin...
Avec Sarkozy, au moins, les choses sont plus simples : il n'a jamais été acteur de cinéma, et il est moins inclassable que peut l'être devenu Arnold Schwarzenegger avec sa volonté de consensus bipartisan rassemblant démocrates et républicains en Californie...
Cordialement, :-)
Hyarion, le démocrate anarcho-monarchiste.