Je ne sais ce qu'il en est pour vous, mais, pour ma part, je commence être à nouveau quelque peu agacé par l'ambiance d'anarque générale qui règne, plus que jamais, un peu partout en ce moment, dans ce monde de Teletubbies qu'est devenu la France de Qui-vous-savez...
Vous souvenez-vous des Teletubbies, chers lecteurs ? Pour ceux qui l'ignorerait, ou l'aurait oublié, il s'agit des attendrissants personnages d'une célèbre série télévisée britannique en 365 épisodes de 25 minutes, destinée aux très jeunes enfants de 0 à 2 ans. Produite par Ragdoll Productions, tournée dans le comté de Warwick ou Warwickshire, en Angleterre, et diffusée à l'origine entre mars 1997 et janvier 2001 par la BBC, cette série a connu un succès international et a été diffusée notamment en France sur Canal+, au Québec sur Télé-Québec et en Suisse sur la Télévision Suisse Romande.
Encore aujourd'hui, dix ans après sa création, la série est toujours présente sur diverses chaînes de télévision dans 120 pays du monde - dont, en France, la chaîne thématique TiJi, depuis 2002. Les Teletubbies, conçus par leurs créateurs comme des "bébés technologiques", se présentent comme de sympathiques créatures ressemblant à de grosses peluches de couleurs vives, répondant aux doux noms de Tinky Winky (en violet), Dipsy (en vert), Lala (en jaune) et Po (en rouge), tous les quatre vivant en communauté à Teletubbyland, dans un dôme futuriste appelé "Tubbydome Supertronic" ou "Tubbytronic Superdome", et situé au milieu de collines verdoyantes où l'on trouve des lapins, des fleurs et des périscopes parlants. Dans le monde joyeux et apaisant de Teletubbyland, les gentils Teletubbies jouent, dancent, font des bêtises, et se nourrissent de TubbiToasts, biscuits ronds avec un sourire, ou de TubbyDélice, sorte de boisson rose qu'ils boivent dans un bol à paille intégrée. On se souvient qu'en 1999, les Teletubbies ont été pris pour cible par l'écrivain américain Bret Easton Ellis, qui, dans un texte, les considérait comme "maléfiques", la série télévisée présentant, selon lui, l'image lénifiante d'un monde aseptisé et planifié, déconnecté de la réalité, né de l'hypocrisie des adultes et conforté par elle.
Hasard du calendrier, les Teletubbies ont effectué, tout récemment, dans le cadre d'un "Teletubbies Tour" international pour célébrer leur 10e anniversaire, une visite à... Paris, où on a notamment pu les voir lundi dernier, 15 octobre, sur la place de la Concorde...
Que la série des Teletubbies soit censée être adaptée aux enfants encore à l'âge du berceau, passe encore... Mais que les beaux discours si éloignés du réel, et les gesticulations sur-médiatisées au service du vide, tels que ceux adressés aux Français par Sarkozy de Nagy-Bocsa, puissent avoir les mêmes effets décérébrants sur les citoyens que peuvent avoir les innocentes tribulations télévisées des Teletubbies sur les adultes, voila qui est aussi affligeant que désespérant. Quand ouvrira-t-on enfin les yeux sur la réalité de la présidence sarkozyste ? Quand prendra donc fin cette ambiance d'apesanteur politique qui dure depuis trop longtemps ? Le réveil viendra bien un jour, mais la chute dans le réel sera d'autant plus dure qu'elle n'aura que trop tardé...
C'est une déclaration pas si vieille que ça (elle n'a même pas dix jours), faite à Sofia [pendant la visite officielle de Sarkozy en Bulgarie, le 4 octobre dernier], lors de son grand raout humanitaire : "Chaque fois que quelqu'un est humilié, est persécuté, est opprimé, a lâché Sarkozy, il devient automatiquement français." Bon. Il y a de quoi se taper le cul par terre, non ? Non, disent certains : il nous l'a déjà faite, celle-là, pendant sa campagne électorale. Certes. Bonjour les blasés. Mais il y a un détail : nous n'y sommes plus, en campagne électorale. Il est président, maintenant. Le temps des folles promesses et des discours ronflants destinés à entourlouper l'électeur est derrière nous.
Du moins, il est censé être derrière nous. Et le Président est censé maintenir un certain contact avec le réel. Or le réel, c'est quoi ? C'est, depuis cet été, la traque des sans-papiers avec objectif chiffré. C'est, à Amiens, un enfant tchétchène qui en fuyant la police tombe du 4e étage [le 9 août dernier] et se retrouve dans le coma. C'est une Chinoise sans papiers paniquée qui se jette par la fenêtre et meurt [le 20 septembre]. C'est un sans-papiers égyptien qui tente de s'immoler par le feu à Paris [le 5 octobre] (ça faisait vingt-deux ans qu'il essayait de régulariser sa situation). C'est l'amendement Mariani sur l'ADN [ajouté au projet de loi du ministre Hortefeux relatif à la maîtrise de l'immigration] et l'indignation massive qu'il déclenche, au point que SOS-Racisme, "Libération" et "Charlie Hebdo" remplissent un Zénith là-dessus [le 14 octobre], avec en prime un député UMP (François Goulard). Ce sont les nombreux Africains, et pas qu'eux, qui n'ont toujours pas avalé le discours Banania de Sarkozy à Dakar [lors de la visite officielle du président français au Sénégal, le 26 juillet dernier]. Le réel, c'est aussi la main qu'il a tendue au dictateur Kadhafi, preneur d'otages et oppresseur de son peuple. C'est la main serrée à Poutine et l'acquiescement à la "spécificité" de sa conception des droits de l'homme [lors de la visite officielle de Sarkozy en Russie, les 9 et 10 octobre derniers]. C'est le soutien du bout des lèvres au peuple birman, dont on sait bien qu'il a beau être "humilié, persécuté, opprimé", on ne va pas lui sacrifier les intérêts de Total [bien que la société pétrolière et gazière française soit, depuis longtemps, accusée de collusion avec la junte militaire au pouvoir en Birmanie]...
Bref, le réel, c'est la Real Politik à la Sarkozy. Mais ce n'est pas cette France mythifiée, toute d'amour et de chocolat, dégoulinante de "droits-de-l'hommisme" qu'il essaie de nous faire gober. Ce n'est pas cette atmosphère de campagne électorale permanente qu'il fabrique sciemment.
La règle est inflexible : plus les mots du pouvoir sont gagnés par l'enflure, plus ses formules se font grandiloquentes, et plus c'est le réel qui morfle.
Nous y sommes. »
(Jean-Luc Porquet, Le Canard Enchaîné N°4538, 17 octobre 2007)
Aujourd'hui, jeudi 18 octobre, a débuté la première grande épreuve sociale pour Sarkozy et son gouvernement, avec le déclenchement d'un mouvement de grève massif contre la réforme des régimes spéciaux de retraite, mouvement de grève qui a été largement suivie, surtout dans les transports publics, la mobilisation à la SNCF ayant été particulièrement forte, avec plus de 73% de grévistes, soit 10 points de plus qu'en 1995, à l'époque des grèves anti-Juppé. La France est-elle enfin sur le point de sortir de sa torpeur ? Pas sûr, car la seule question qui intéresse vraiment les Français, à en croire les médias, c'est une information d'ordre anecdotique, sans intérêt véritable, mais sur laquelle, une fois n'est pas coutume, Sarkozy de Nagy-Bocsa n'avait pas cherché à communiquer jusqu'à aujourd'hui... Voilà, en effet, le chef de l'Etat dépassé par sa propre logique de sur-communication au service du vide, car la France est maintenant sous perfusion sarkozyste, dépendante du feuilleton pathétique que Sarkozy a créé pour elle, la créature ayant depuis échappé au maître... Du coup, il a bien fallu finir par lâcher du lest...
Deux heures plus tôt, un communiqué de l'Elysée évoquaient une "séparation par consentement mutuel", une situation totalement inédite pour un président français, mettant ainsi fin à plusieurs mois de rumeurs et de spéculations.
Par ce communiqué lapidaire de 15 mots,le couple présidentiel a officialisé ce qui faisait presque quotidiennement la une des médias.
Encore jeudi matin, " l'affaire Cécilia " éclipsait dans plusieurs journaux dont Libération la grève nationale sur les régimes spéciaux de retraite.
"Cécilia et Nicolas Sarkozy annoncent leur séparation par consentement mutuel. Ils ne feront aucun commentaire", déclare le communiqué rendu public à 13H20 par l'Elysée.
Le mot de divorce n'apparaissait pas dans ce premier communiqué, alors que des constitutionnalistes avaient débattu tout au long de la semaine sur la possibilité pour le chef de l'Etat de divorcer, en raison de son statut qui le protège de tout acte en justice.
Juste après cette annonce, le président a quitté la France pour un sommet européen à Lisbonne.
Premier divorcé élu à l'Elysée, Nicolas Sarkozy, 52 ans, est donc également le premier chef d'Etat français à se séparer officiellement de son épouse pendant son mandat.
Pressé depuis plusieurs semaines par les médias de clarifier sa situation de couple, M. Sarkozy a mis fin à une incertitude qui pesait sur ses activités présidentielles. Les journalistes le questionnaient sans relâche sur sa vie privée, et avaient lundi encore interrogé son porte-parole sur la présence ou non de Cécilia à une visite d'Etat au Maroc, la semaine prochaine.
Traditionnellement, la Première dame accompagne le chef de l'Etat dans ces visites.
Mariés depuis 1996 - leur anniversaire de mariage tombe le 23 octobre -, le couple a un fils, Louis, agé de 10 ans. Il offrait l'image d'une famille recomposée, avec les deux filles Judith et Jeanne-Marie nées d'une première union de Cécilia avec l'animateur Jacques Martin, et Pierre et Jean, issus du premier mariage de Nicolas Sarkozy.
Cécilia n'était plus apparue en public depuis le 20 septembre, jour des obsèques de Jacques Martin.
Elle est cette semaine à la une des principaux hebdomadaires, avec deux photos posées dans Paris Match, prises dans un grand hôtel parisien par l'auteur de la photo officielle du président.
Nicolas Sarkozy, et son épouse, 49 ans, s'étaient déjà séparés en 2005, avant de se retrouver un an plus tard.
Après avoir été très présente à ses côtés dans la vie politique - elle fut notamment sa chef de cabinet à l'UMP - Cécilia Sarkozy s'était mise en retrait, n'apparaissant quasiment pas en public pendant la campagne présidentielle. Mais on lui prêtait une influence importante dans l'ombre.
Le président, qui n'a jamais fait mystère de l'importance de son épouse à ses yeux et qui multipliait publiquement hommages et attentions, avait affirmé pendant la campagne et depuis son élection que son épouse "aurait un rôle", encore à définir, auprès de lui à la présidence.
Le couple ne s'était toutefois pas installé à l'Elysée et Mme Sarkozy n'avait fait que très peu d'apparitions officielles.
Elle était en revanche intervenue de façon aussi spectaculaire qu'inattendue dans le dossier des soignants bulgares détenus en Libye, faisant deux fois le voyage de Tripoli comme "émissaire personnel" de son époux et raccompagnant les infirmières à Sofia dans un avion officiel français.
Ses absences répétées alimentaient les rumeurs. Cet été, en vacances aux Etats-Unis, elle avait renoncé au dernier moment à un déjeuner chez le président George Bush, officiellement pour cause "d'angine blanche", avant d'être photographiée le lendemain faisant du shopping.
En 2005, avant leur première séparation, elle avait lancé dans le magazine Télé Star: "Je ne me vois pas en first lady. Cela me rase. Je ne suis pas politiquement correcte".
Depuis la présidentielle, la rivale socialiste de M. Sarkozy, Ségolène Royal et son compagnon François Hollande, numéro 1 du PS, ont également annoncé leur séparation.
Un des premiers à réagir à l'annonce de l'Elysée, le député socialiste Arnaud Montebourg a lancé: "La France se moque comme d'une guigne des peines de coeur de ses dirigeants politiques."
(Dépêche de l'Agence France Presse [AFP], 18 octobre 2007, 14h56)
Décidément, quoi qu'en dise ce gros malin de Montebourg, entre apesanteur politique - avec évaporation cérébrale "télétubbistique" - et informations anecdotiques mais censées être "généralistes" et présentées comme telles, les Français semblent trouver leur compte, dans ce qui semble être, pour la plupart d'entre-eux, le meilleur des mondes possibles... Le réel, lui, reste en grande partie à la marge... mais que voulez-vous, la concierge qui est censée sommeiller en chacun de nous n'a pas besoin de grand-chose pour s'épanouir, juste de quoi alimenter ce fameux partage social des émotions dont nous sommes si dépendants, dans une société où la place des médias est si importante... comme celle des rumeurs et des commérages.
Quand on sait que Cécilia Sarkozy n'a même pas pris la peine d'aller voter au deuxième tour de la dernière élection présidentielle, en mai dernier, il n'y a vraiment pas de quoi s'étonner de la rupture - véritable, celle-là - du couple Sarkozy. Je n'ai, pour ma part, rien d'autre à dire sur ce divorce présidentiel, si ce n'est qu'il tend à confirmer que Sarkozy de Nagy-Bocsa aura décidément tout sacrifié sur l'autel de l'ambition personnelle et du pouvoir. C'est triste pour sa famille, mais plus encore pour le pays, qui n'avait vraiment pas besoin d'avoir un tel homme à sa tête... Maintenant, pour nous, comme pour lui, le vin est tiré, et il faut bien le boire... même s'il a un goût de mauvais vinaigre...
Passons donc à autre chose, en attendant le réveil des Français, encore majoritairement endormis dans Teletubbyland...
Cordialement, :-)
Hyarion, le démocrate anarcho-monarchiste.